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             Avec sa nomination comme Présidente de la soixante et 
              unième Assemblée générale de l'ONU, 
              Sheikha Haya Rashed Al Khalifa, du Barheïn, est la troisième 
              femme à occuper ce poste prestigieux (voir l'Interview de 
              la Chronique ONU, à la page 10). Avant elle, Vijaya Lakshmi 
              Pandit (Inde), qui a présidé la huitième session 
              en 1953, et Angie Elisabeth Brooks (Liberia), qui a présidé 
              la vingt-quatrième session en 1969, ont assumé cette 
              fonction à des périodes où les Nations Unies 
              faisaient face à des temps incertains. Leur histoire offre 
              un portrait révélateur du chemin parcouru par l'Organisation 
              en cinquante ans et celui qui lui reste à parcourir pour 
              promouvoir l'égalité des sexes. 
               
             
            Bien que venant d'horizons différents, ces deux femmes présentent 
            des points communs. Elles viennent toutes deux de pays en développement 
            étroitement liés à la langue anglaise. L'Inde 
            a été l'un des premiers pays à obtenir son indépendance 
            pendant la période tulmutueuse qui a suivi la Seconde Guerre 
            mondiale, devenant un État souverain en 1947. Le Liberia, fondé 
            en 1847 par d'anciens esclaves des États-Unis, a été 
            la première République africaine indépendante. 
            Les deux pays ont une longue histoire en matière d'autonomisation 
            des femmes.  
             
             
            
               
                   | 
               
               
                | Photo ONU/Sofia 
                  Paris  | 
               
             
             
             Quand Indira Gandhi, une nièce de Mme Pandit, a été 
              nommée Premier ministre d'Inde en 1965, elle est devenue 
              l'une des premiers chefs de gouvernement dans un pays d'Asie, continuant 
              la tradition de Sirimavo R. D. Bandaranaike, du Sri Lanka, qui a 
              été la première femme à occuper les 
              fonctions de Premier ministre en 1960. De même, Ellen Johnson-Sirleaf 
              est devenue la première femme à accéder à 
              la fonction d'un chef d'État africain, après avoir 
              remporté les élections présidentielles au Liberia 
              en 2005. Mmes Pandit et Brooks ont été, dans leur 
              pays respectif, des pionnières dans le domaine des droits 
              de la femme, ouvrant la voie aux futures géné-rations 
              de femmes dans les services civils et gouvernementaux.  
             
            Le Président de l'Assemblée générale, 
              même s'il n'est pas une figure publique aussi importante que 
              celle de Secrétaire général de l'ONU, occupe 
              un rôle de premier plan très différent. Sheikha 
              Haya devra probablement présider une Assemblée transformée 
              - elle qui s'était fait entendre ces dernières années, 
              demandant une plus grande participation à la réforme 
              des Nations Unies. Lorsque la soixante et unième Assemblée 
              sera ouverte en septembre, sa première tâche urgente 
              sera de présider l'élection du prochain Secrétaire 
              général. Considérée parfois comme un 
              simple " tampon " ratifiant les décisions du Conseil 
              de sécurité, l'Assemblée générale 
              a récemment souligné la nécessité de 
              jouer un rôle plus actif dans le processus de prises de décision. 
             
            Alors que nombreux sont ceux qui ont salué la nomination 
              de Sheikha Haya, y compris le Secrétaire général 
              Kofi Annan, espérant qu'elle inaugurera une période 
              plus favorable à la promotion des femmes aux Nations Unies, 
              il est essentiel de comprendre le passé pour pouvoir créer 
              un avenir meilleur. Les parcours personnels de Mmes Pandit et Brooks, 
              deux sommités dans le domaine de la diplomatie à l'ONU, 
              sont importants pour comprendre la contribution vitale des femmes 
              à l'Organisation. Comme l'a déclaré Eleanor 
              Roosevelt dans la Déclaration de 1946 sur la participation 
              des femmes aux travaux des Nations Unies - " [les femmes doivent] 
              reconnaître que le but de la pleine participation dans la 
              vie et les responsabilités de leur pays et de la communauté 
              internationale est un objectif commun " et ceci est plus important 
              à l'ONU que dans toute autre organisation.  
            Une figure féminine en faveur de la décolonisation 
             
            Vijaya Lakshmi Pandit, la plus jeune sur du Premier ministre 
              Jawaharlal Nehru, a grandi dans une famille où la politique 
              occupait une place importante et s'est engagée dans la lutte 
              pour l'indépendance. Le deuxième Secrétaire 
              général de l'ONU, U Thant, a résumé 
              ses réalisations : " Cette femme éduquée 
              et ouverte sur le monde, qui a été tant de fois une 
              pionnière - elle fut la première femme ministre du 
              cabinet, la première femme ambassadrice, la première 
              femme à la tête d'une délégation de l'ONU 
              - a été également la première femme 
              à présider l'Assemblée générale 
              des Nations Unies ". Avant d'entrer aux Nations Unies, elle 
              a été élue en 1937 ministre de la santé 
              et du gouvernement local dans l'État indien d'Utter Pradesh. 
              Assumant déjà des responsabilités importantes 
              au sein du parti du Congrès indien, elle a été 
              propulsée sur la scène internationale en 1945 lorsqu'elle 
              a représenté officieusement l'Inde à la première 
              conférence de l'ONU à San Francisco pendant la période 
              qui a suivi la Seconde Guerre mondiale. Alors qu'une délégation 
              officielle de l'Inde britannique assistait à la cérémonie, 
              reflétant la position de son colonisateur, elle s'est adressée 
              aux 51 États Membres pour demander l'indépendance 
              immédiate de l'Inde. " Son discours a été 
              un beau succès oratoire ", a écrit le diplomate, 
              homme politique britannique et lauréat du prix Nobel 1959, 
              Philip Noel-Baker. " Mais, surtout, elle a convaincu ces délégués 
              qui avaient des doutes que, si l'Inde pouvait produire de telles 
              femmes, elle était capable, sans aucun doute, de contrôler 
              elle-même ses affaires nationales ", a-t-il ajouté. 
              " Un grand coup avait été porté ce jour-là 
              à ce que le Président de Gaulle a appelé, dix 
              ans plus tard, " la nécessaire décolonisation 
              du monde1 ". 
             
            Après que l'Inde a obtenu l'indépendance, Mme Pandit 
              s'est rapidement élevée au rang de diplomate, usant 
              de son charisme et de son talent de négociatrice pour convaincre 
              ses alliés. Le fait que son frère était premier 
              ministre lui a donné plus de crédibilité, un 
              atout dont elle avait besoin à une époque où 
              les femmes diplomates étaient peu nombreuses et peu souvent 
              élues. Elle a été ambassadrice à trois 
              postes considérés à l'époque et de nos 
              jours comme les plus importants pour l'Inde : Moscou, Londres et 
              Washington. Quand elle est devenue déléguée 
              auprès des Nations Unies, elle était donc connue et 
              respectée. Elle s'est faite la championne du processus de 
              décolonisation et du mouvement des pays non-alignés. 
              Elle a attiré l'attention sur les inégalités 
              entre les pays développés et ceux en développement, 
              faisant valoir que les Nations Unies devraient servir de pont pour 
              réduire le fossé croissant qui les divisaient.  
               
             
               
                   | 
               
               
                | Vijaya Laksmi 
                  Pandit avec le prince héritier japonais Akihito et le 
                  Secrétaire général Dag Hammarskjöld 
                  en 1953. PHOTO ONU | 
               
             
            Dans son discours historique de 1945 prononcé à San 
              Francisco, Mme Pandit a souligné le fossé socio-économique 
              et politique qui sépare les colonisateurs et les colonisés, 
              maniant avec aisance la rhéthorique comme d'autres figures 
              légendaires de la décolonisation, telles que Franz 
              Fanon. Selon Horace Alexander, un penseur indien pacifiste, elle 
              " a clairement indiqué que le temps était venu 
              pour que la majorité non blanche soit représentée 
              de manière adéquate et authentique dans les conseils 
              mondiaux1 ". Elle n'avait pas peur de se placer dans le contexte 
              du débat Nord-Sud et de défendre vigoureusement les 
              droits des pays du tiers-monde. Elle est peut-être plus connue 
              pour le débat houleux sur l'apartheid qui l'avait opposée 
              au maréchal Jan Christian Smuts, le héros de guerre 
              sud-africain décoré, un des fondateurs de la Société 
              des Nations. En 1946, à la tête de la délégation 
              indienne, elle a présenté à l'ONU une résolution 
              condamnant les politiques ségrégationnistes de l'Afrique 
              du Sud. K.P.S. Menon écrit que " ne se laissant pas 
              intimidée [par le prestige de Smuts], Vijaya Lakshmi s'est 
              faite la championne de la cause indienne et asiatique en Afrique 
              du Sud en s'exprimant avec clarté, vigueur, émotion 
              et, parfois, avec des touches d'ironie ". La résolution, 
              opposant les Blancs aux autres, a été adoptée 
              avec seulement une voix de plus que la majorité aux deux-tiers 
              requise.  
             
            En revanche, on sait moins qu'avant d'être Présidente 
              de l'Assemblée générale, Mme Pandit a failli 
              être nommée Secrétaire générale 
              des Nations Unies. Après la démission de Trygve Lie 
              en 1953, aucune des propositions de remplacement offertes par les 
              États-Unis, l'Union soviétique et le Danemark ne recueillait 
              le nombre nécessaire de voix du Conseil de sécurité. 
              Les nominations par les deux superpuissances faisaient l'objet de 
              controverses, les politiques de la guerre froide exigeant que tout 
              candidat proposé par l'une ou l'autre soit issu des pays 
              non-alignés. Ni les Américains ni les Soviétiques 
              n'ont donc réussi à recueillir les 7 voix nécessaires 
              sur les 11. La nomination de Lester Pearson par les Danois, qui 
              est ensuite devenu Président du Canada et lauréat 
              du prix Nobel de la Paix, a recueilli 9 voix, mais une voix négative 
              d'un membre du Conseil de sécurité a tout fait capoter. 
              Tout laisse à penser que le veto a été apposé 
              par l'Union soviétique. 
             
            Le 19 mars 1953, durant une réunion, " le représentant 
              de l'URSS a proposé au Conseil de recommander la nomination 
              de Mme Vijaya Lakshmi Pandit ". Originaire d'un pays non-aligné, 
              elle aurait été perçue comme un pôle 
              d'équilibre entre les deux superpuissances. Cependant, avec 
              8 abstentions, 2 voix pour et 1 contre, elle n'a pas réussi 
              à recueillir le nombre de voix suffisantes. Cela a peut-être 
              été dû au fait qu'elle était une partisane 
              acharnée de la décolonisation à une période 
              où la plupart des États du tiers-monde étaient 
              encore des colonies et n'étaient pas officiellement représentés 
              aux Nations Unies. Ses positions critiques ont pu déplaire 
              à de nombreux pays occidentaux dont certains la trouvaient 
              trop radicale. En outre, la politique étrangère pro-soviétique 
              adoptée tacitement par le Premier ministre Nehru a pu influencer 
              négativement ces pays qui étaient sous la sphère 
              d'influence américaine. Toujours est-il que tout espoir de 
              devenir la première Secrétaire générale 
              est tombé à l'eau. 
             
            La carrière de Mme Pandit dans la diplomatie a connu des 
              bas dans les années 1960. Elle a rejoint la politique, est 
              devenue gouverneur de l'État indien du Maharashtra et a, 
              plus tard, obtenu un siège à la chambre basse du Parlement, 
              le Lok Sabha. De plus en plus déçue et frustrée 
              par la corruption politique et les tendances totalitaires d'Indira 
              Gandhi, elle a démissionné, se retirant de la vie 
              politique. Son point de vue de plus en plus critique sur la décision 
              de sa nièce de déclarer l'état d'urgence, procédant 
              à une réduction massive des libertés civiles 
              et faisant incarcérer ses opposants, a provoqué un 
              schisme au sein de la famille Nehru et du parti du Congrès. 
              On se souviendra cependant de Mme Pandit, comme l'a indiqué 
              Malcolm Macdonald, pour ses " solides connaissances en matière 
              d'affaires internationales, sa vaste expérience diplomatique 
              et sa sagesse qui, associée à sa grâce personnelle, 
              ont fait d'elle une ambassadrice remarquable ". Son dernier 
              poste fut celui de représentante de l'Inde à la Commission 
              des droits de l'homme de l'ONU. À la veille de son 70e anniversaire, 
              l'ancien Président américain Harry Truman, a résumé 
              l'opinion que le monde se faisait de cette diplomate charismatique 
              : " Madame Pandit a servi avec efficacité et distinction 
              l'intêrêt non seulement de sa propre nation mais aussi 
              celui de la communauté internationale. " Elle est décédée 
              le 1er décembre 1990.  
            L'autonomisation des femmes africaines 
             
            Il faudra attendre 15 ans pour qu'une autre femme soit nommée 
              Présidente de l'Assemblée générale. 
              La nomination d'Angie E. Brooks à la tête de l'ONU 
              a été le point culminant d'une vie d'épreuves 
              et de travail acharné. Contrairement à Mme Pandit, 
              qui était née dans une famille riche, Mme Brooks était 
              l'une des neufs enfants d'un " révérend de l'Église 
              africaine méthodiste épiscopale de Zion ". Elle 
              a grandi dans une famille d'accueil, ses parents étant trop 
              pauvres pour l'aider. Après avoir étudié le 
              droit auprès d'un tuteur, elle a été admise 
              à la Shaw University en Caroline du Nord. Ne pouvant payer 
              son voyage, elle a sollicité personnellement l'aide du Président 
              du Liberia, avec une ténacité qui ne se démentira 
              jamais. " Au Liberia, le bureau du Président est ouvert 
              à tous [
] Je ne cessais d'harceler [le Président 
              William V. S. Tubman]. J'avais entendu dire qu'il aimait se promener 
              à six heures. Alors, un matin, je suis allée le voir2. 
              " Son insistance a finalement porté ses fruits et elle 
              a reçu les fonds nécessaires pour faire ses études 
              aux États-Unis. 
               
             
               
                   | 
               
               
                | Angie Elisabeth 
                  Brooks, représentante du Liberia en 1955, avec S.M. Khan 
                  du Pakistan et Ishar Harari d'Israël. PHOTO ONU | 
               
             
            Après avoir travaillé au ministère de la Justice 
              du Liberia, Mme Brooks a été nommée à 
              la délégation auprès des Nations Unies, en 
              1954, juste à la fin du mandat de Mme Pandit. Elle a conservé 
              ce poste pendant deux décennies jusqu'à sa nomination 
              comme présidente de la vingt-quatrième Assemblée 
              générale en 1969. Sa carrière aux Nations Unies 
              a été prestigieuse. En 1956, elle a été 
              vice-présidente de la Quatrième commission de l'Assemblée, 
              chargée de surveiller la situation des territoires coloniaux 
              et non autonomes. Six ans plus tard, elle est devenue présidente 
              de la Commission des Nations Unies pour le Rwanda et le Burundi, 
              puis, en 1964, a été nommée à la tête 
              d'une mission de visite des Nations Unies dans les territoires pré-indépendants 
              des îles du Pacifique. En 1965, elle a été vice-présidente, 
              puis présidente du Conseil de tutelle - l'organisme chargé 
              de surveiller les territoires sous tutelle. Elle a été 
              la première femme et la première Africaine à 
              occuper cette fonction. 
             
            Dans son discours d'ouverture devant l'Assemblée, elle n'a 
              pas mâché ses mots : " L'ONU [
] a perdu 
              de son prestige à cause de son manque de dynamisme. Notre 
              faiblesse [
] semble être due à notre vision étroite 
              dans le domaine des affaires mondiales, comme si celles-ci se jouaient 
              au siège de New York. Nous n'avons pas toujours réalisé 
              que ni les discours brillants ni les accords entre les délégués, 
              ni même les résolutions ou les recommandations, n'ont 
              eu un impact important sur l'ensemble des affaires mondiales. " 
              Elle a laissé " une image de charme féminin et 
              de sagacité diplomatique2 ". Elle savait se faire comprendre 
              sans problème et n'hésitait pas à réprimander 
              ses collègues délégués " de manière 
              franche et maternelle ". Après avoir représenté 
              son pays à l'ONU, elle a été juge à 
              la Cour suprême du Liberia. 
            L'avenir du processus de sélection 
            Pourquoi les nominations des femmes présidentes de l'Assemblée 
              générale sont-elles si espacées ? Après 
              tout, alors que les pays sont plus nombreux à ouvrir leurs 
              systèmes électoraux aux électrices, il semble 
              curieux qu'il y ait si peu de femmes aux postes les plus prestigieux 
              de l'ONU. Il faut savoir que l'Assemblée, comme toutes les 
              autres commissions et tous les conseils de l'ONU, est composée 
              de représentants des États Membres et non pas de bureaucrates 
              de l'ONU. Il appartient donc aux gouvernements nationaux d'élire 
              les hauts fonctionnaires à l'Assemblée générale, 
              car seuls leurs représentants nomment le président. 
               
             
            Selon Sydney Dawson Bailey, à la fois les règles 
              non officielles et les décrets officiels sont importants 
              dans le processus de sélection du président de l'Assemblée 
              générale3. " Dans la sélection des hauts 
              fonctionnaires, les compétences personnelles devraient être 
              le critère essentiel ", mais " plus les États 
              Membres d'une assemblée sont hétérogènes, 
              plus le critère de la compétence dans la sélection 
              des hauts fonctionnaires tend à laisser la place à 
              un système de roulement ou de répartition équitable 
              ". L'Assemblée étant sans aucun doute l'organe 
              le plus diversifié et le plus représentatif des Nations 
              Unies, cette notion de représentation régionale est 
              particulièrement importante. Il écrit : " La 
              présidence revient par roulement à une région 
              selon un processus équitable [
], les représentants 
              de toutes les régions géographiques, à l'exception 
              de l'Europe de l'Est, ayant déjà assumé plusieurs 
              fois les fonctions de président ". De même que 
              le roulement par région de la présidence de l'Assemblée 
              est une tradition de fait, il existe un consensus selon lequel aucun 
              des cinq membres permanents du Conseil de sécurité 
              ne peut se porter candidat à ce poste - et, à ce jour, 
              cette règle est toujours en vigueur.  
             
            Le processus de sélection présente une caractéristique 
              : les candidats ne sont pas officiellement nommés par les 
              pays et il n'y a pas de campagne officielle. Chaque pays dispose 
              d'une voix et le vote est anonyme. Étant donné les 
              précédents régionaux et l'absence de campagnes 
              officielles, les candidats à la présidence cherchent 
              à recueillir des voix dans les coulisses et les couloirs 
              de l'ONU. Et pour qu'un pays pousse son représentant à 
              la candidature, sa délégation doit convaincre ses 
              alliés de voter pour lui. Le système de roulement 
              permet d'assurer que les candidats, qui visent avant tout à 
              consolider le soutien à leur région sont issus chaque 
              année de régions différentes. Comme le fait 
              remarquer M. Bailey, le fait qu'il n'y ait pas d'élections 
              directes " n'a pas éliminé, bien sûr, le 
              processus de nomination : il a été transféré 
              de l'Assemblée dans les couloirs. De plus, il a été 
              impossible d'éviter les nominations déguisées 
              ".  
             
            Alors, pourquoi les femmes, dans ce processus de plus en plus complexe, 
              ont-elles été écartées de cette fonction 
              ? Alors que la présidence de l'Assemblée revient tous 
              les cinq ans, ou à peu près, à chaque région, 
              peu de délégations ont voulu prendre le risque de 
              nommer une femme. Alors que la concurrence est vive dans chaque 
              région, il n'est pas conseillé de proposer une candidate 
              pouvant susciter des controverses. La situation des femmes à 
              l'Assemblée générale, déjà désavantagées 
              alors que les délégations initiales de l'ONU comprenaient 
              peu de femmes diplomates, s'est enlisée, et celles-ci ont 
              continué d'être sous-représentées aux 
              Nations Unies. Les pays développés comme les pays 
              en développement ont continué d'élire principalement 
              des hommes diplomates aux postes élevés, peu disposés 
              à changer le statu quo et à compromettre les chances 
              de voir élire leurs candidats. 
             
            Les Nations Unies sont à la croisée des chemins en 
              matière d'égalité des sexes. Alors qu'il incombe 
              aux États Membres et non pas aux fonctionnaires de l'ONU 
              d'élire des femmes, la situation ne changera que lorsqu'il 
              y aura un consensus autour d'une réforme. Il faut espérer 
              que le prochain mandat de Sheikha Haya permettra d'accroître 
              la visibilité des femmes aux Nations Unies, même une 
              fois terminé. Comme l'a déclaré Mme Brooks 
              dans son discours de clôture à l'Assemblée générale, 
              " s'il reste beaucoup à faire, des voies nouvelles à 
              explorer, de nouvelles attitudes à adopter et de nouvelles 
              idées à trouver, nous indiquons la voie aux futures 
              assemblées ". Il faut espérer que le mandat de 
              Sheikha Haya créera un précédent pour les futures 
              assemblées et qu'il ne faudra pas attendre encore une fois 
              37 ans pour qu'une femme soit présidente de l'Assemblée 
              générale. 
             
              Notes 
               
            1 Mehta, Chandralekha et al. Sunlight Surround You. New 
              Delhi: Orient Longmans, 1970. 
              2 Crane, Louise. Ms. Africa: Profiles of Modern African Women. 
              Philadelphia: Lippincott, 1973. 
              3 Bailey, Sydney Dawson. The General Assembly of the United 
              Nations: A Study of Procedure and Practice. Westport, Conn: Greenwood 
              Press, 1978, c.1964. 
             
             
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